Themanews n°33 -  3 décembre 2024
Texte: Pierre-Michel Vidoudez, secrétaire général
Photos : UPSA Suisse et Ferrari Architecte

L'avenir des cours interentreprises, un enjeu à ne pas négliger

Les cours interentreprises (CIE), forment un des trois piliers de notre système de formation duale et suscitent, étonnamment, bien des débats. A l'occasion de la « Journée spéciale » du 27 novembre dernier, organisée à l'École de la construction à Tolochenaz, par la Haute Ecole fédérale en formation professionnelle (HEFP), j’ai eu l’occasion d’entendre des perspectives variées sur leur évolution et de participer à la table ronde à l’issue des présentations. Il en ressort une question clé : les CIE sont-ils encore fidèles à leur mission première ?

Conçus pour transmettre un socle de compétences pratiques, initiales et uniformes, les CIE semblent aujourd’hui devoir jouer un rôle élargi. Entre la spécialisation des entreprises et les contraintes de productivité, ces cours assument désormais une part croissante de la formation à laquelle certains voudraient ajouter de nombreux compléments afin de garantir une employabilité totale des apprentis à la fin de leur parcours. Cette évolution, aussi naturelle qu’inquiétante, amène son lot de conséquences : un nombre accru de jours de cours, des coûts alourdis, et une complexité de gestion exacerbée.

Et le financement, me direz-vous ? Un défi herculéen ! Comment en effet assurer la coordination des pratiques de 26 cantons concernant plus de 200 métiers différents, en trois langues distinctes et en tenant compte des intérêts publics et privés ? Si certains prônent un modèle financé par les fonds publics, à l’instar du Valais, d’autres, comme notre président Nicolas Leuba, prônent un financement privé, à l’image du centre de formation professionnelle de l’UPSA-Vaud financé et construit par le Fonds Interprofessionnel de Prévoyance. Les approches varient, mais les conséquences restent le même : « Qui paie commande », comme dit l’adage. Il en résulte de nombreux dilemmes quant à la provenance des financements : qui dit fonds publics dit contrôles étatiques (y compris sur le statut des formateurs) et qui dit fonds privés dit liberté quant à l’utilisation des moyens engagés mais incertitude quant à leur pérennité.

Ce qui me frappe, c’est la polarisation des visions. D’un côté des institutions étatiques ou paraétatiques souhaitant limiter la portée et les coûts des CIE et de l’autre des entreprises et des centres de formation qui font le constat de l’échec d’un modèle qui n’est plus adapté ni aux jeunes allophones ni à une nouvelle génération qui ne veut plus travailler comme les précédentes.

D’un côté, une approche égalitariste, largement subventionnée, visant l’individualisation des parcours en donnant sa chance à chacun (qu’importe finalement ses compétences) ; de l’autre, une philosophie plus pragmatique, misant sur l’initiative privée et orientée vers l’excellence. Mais dans ce tumulte, un aspect fondamental me semble trop souvent négligé : l'intérêt économique des entreprises.

Pour rester compétitives sur le plan local comme international, celles-ci doivent pouvoir compter sur une relève bien formée. Or pour les entreprises formatrices avoir, même un seul ou des apprentis a un coût, quelles que soient les aides reçues. C’est un investissement en ressources humaine, financière et temporelle. Plutôt que d’individualiser les aides aux apprentis, ne devrait-on pas envisager également d’individualiser les aides aux entreprises formatrices ?

Il est urgent de recentrer le débat. Les CIE doivent avant tout rester des lieux d’apprentissage pratique, garants d’une formation de base initiale reconnue à l’échelle fédérale. Ils ne doivent pas devenir des enjeux économiques ou politiques pour les autorités en charge de la formation ou pour les organisations du monde du travail mais demeurer une institution au service des apprentis et, par extension, au bénéfice de la compétitivité de nos entreprises.

Pour y parvenir, il faudra du dialogue et surtout une vision stratégique commune.
L’objectif ? Préserver ce modèle unique, emblème de notre formation professionnelle, tout en l’adaptant aux réalités du terrain et aux défis de l’économie de nos entreprises afin de maintenir la compétitivité de nos régions et de notre pays.

Quelques faits et chiffres

La plupart des formations professionnelles initiales comprennent des cours interentreprises. L’organisation de ces derniers n’est toutefois pas obligatoire. Bien que la loi ne stipule pas explicitement une obligation universelle d'organiser des CIE pour toutes les professions, elle en prévoit l'organisation lorsque cela est jugé nécessaire par les OrTra ou les associations professionnelles concernées

 Le nombre moyen de jours de CIE est de 27 jours.

 Le coût moyen par jour s'élève à CHF 322.-.

 Le coût total des CIE est d'environ CHF 445 millions par an (cantons : environ CHF 116 millions, fonds cantonaux pour la formation professionnelle : environ CHF 61 millions, fonds de branche pour la formation professionnelle : environ CHF 12 millions, entreprises formatrices : environ CHF 256 millions.

 Les CIE représentent 3% des coûts de la formation professionnelle.

 Sources : présentations lors « Journée spéciale » du 27 novembre dernier, organisée par la Haute Ecole fédérale en formation professionnelle (HEFP)

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